Ressources

Mon expérience de l’endo : Jena

Mon expérience de l’endométriose, par Jena Wren.

Mises en garde : psychiatrisation de problèmes de santé, traumatisme médical, utilisation de termes genrés

Pas un jour ne passe sans que je pense à ma santé.

Recevoir un diagnostic de maladie cœliaque à l’âge de cinq ans m’a donné une conscience aiguë de mon corps. J’ai été très malade pendant les cinq premières années de ma vie. Heureusement, le Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario a découvert, grâce à une endoscopie, que mes maux étaient attribuables à une maladie auto-immune et que j’étais fortement allergique au gluten. Il reste qu’avec toutes ces aiguilles, piqûres, sondes et analyses, le protocole de confirmation diagnostique n’était pas facile à encaisser pour une petite fille et ses parents.

Il a fallu quelques années pour mettre le doigt sur le problème et, aussitôt, ma santé s’est grandement améliorée. J’ai dû m’imaginer par la suite que j’avais été tellement malade pendant mon enfance que c’était derrière moi, que j’avais assez payé.

Malheureusement, de nouvelles difficultés ont surgi avec l’arrivée des règles.

Dès mes premières règles à l’âge de 13 ans, j’ai éprouvé une douleur intense qui irradiait le long de mes jambes, qui me donnait des nausées et qui me clouait au lit tous les mois. Au début, je n’ai pas trop posé de questions, croyant que c’était normal. Ce n’est qu’à l’âge de 16 ans que je suis tombée sur la vidéo YouTube d’une femme qui racontait son expérience de l’endométriose (l’« endo ») et que j’ai commencé à m’inquiéter de mes symptômes.

J’ai pris rendez-vous avec une infirmière praticienne pour en discuter. Je n’oublierai jamais ce moment. Assise en face d’elle, je lui ai expliqué ce que je ressentais et lui ai dit que mes symptômes ressemblaient beaucoup à ceux de l’endo. Elle m’a répondu que « certaines jeunes filles [et personnes] ont simplement des règles difficiles » et qu’il était impossible que j’aie cette maladie-là à mon âge. J’y pense encore quand je regarde les cicatrices sur mon ventre.

Heureusement, mon médecin a insisté pour que la procédure ait lieu et, le 20 janvier, j’ai subi une laparoscopie diagnostique, une ablation des lésions d’endométriose et l’insertion d’un bloc nerveux. Je me souviens de mon arrivée en salle de réveil. J’avais du mal à garder les yeux ouverts, mais je me suis efforcée de demander à l’infirmière s’ils avaient trouvé des traces d’endo. Elle m’a dit qu’ils avaient prélevé ce qu’ils pensaient être des tissus endométriaux à deux endroits. La semaine suivante, j’ai reçu des résultats qui confirmaient ces soupçons. C’était pour moi une incroyable validation. J’avais raison depuis le début, je connaissais mon corps.

J’avais 17 ans quand j’ai essayé une nouvelle approche.

Cette fois, je me suis fait prescrire des contraceptifs oraux. Je les ai pris tous les jours pendant deux semaines avant de m’apercevoir que quelque chose clochait. J’ai cessé de les prendre, mais je n’allais pas mieux.

Nous avons découvert par la suite que le médicament contenait un agent de remplissage à base de blé et que j’avais ingéré, à mon insu pendant 14 jours, la substance même que mon corps était incapable de métaboliser. Pour une raison quelconque, les sociétés pharmaceutiques ne sont pas tenues de divulguer le contenu de leurs médicaments, même les allergènes. J’ai été malade pendant six mois et j’ai dû commencer à prendre un anxiolytique. J’ai pris contact avec la pharmacie et le fabricant, mais aucun n’a admis sa responsabilité. En fait, on m’a reproché de ne pas avoir posé assez de questions avant de prendre le médicament. 

Quelques mois plus tard, j’ai pris rendez-vous avec une gynécologue. Elle pensait que je souffrais d’endométriose et m’a prescrit du Visanne, un médicament qui stoppe les menstruations tout en empêchant l’endométriose de se propager. Et cela a fonctionné. J’ai été asymptomatique pendant un certain temps.

Mais la trêve a pris fin deux ans plus tard.

Je me levais de mon siège à la fin d’un cours quand j’ai senti une étrange sensation de tiraillement et de douleur dans le bas du ventre, à droite. La douleur est devenue très vive et j’ai fini par me rendre aux urgences, où le médecin a soupçonné la rupture d’un kyste. Ma gynécologue pensait que les symptômes étaient probablement attribuables aux lésions nerveuses causées par l’endométriose, lésions dont je garde des tremblements dans la main droite. J’ai été placée sur une liste d’attente pour voir un spécialiste.

Person wearing glasses with medical mask on in a hospital gown

Après un an d’attente, j’ai rencontré mon spécialiste, qui m’a proposé une approche multidisciplinaire. On m’a prescrit des médicaments contre les névralgies et admise à la Clinique de la douleur de l’Hôpital d’Ottawa, un endroit formidable qui regorge de ressources pour surmonter les effets physiques et psychologiques de la douleur chronique. J’ai également été inscrite sur une longue liste d’attente pour l’opération. J’ai pris mes médicaments assidûment, adopté un régime anti-inflammatoire et participé à différents ateliers à la clinique.

Mes symptômes se sont quand même aggravés au fil du temps, si bien que je n’arrivais plus à pratiquer mes activités physiques préférées. Et tout cela s’est passé alors que j’essayais de terminer mes études de premier cycle. Je remercie le ciel que les cours aient migré en ligne. Sinon, je n’aurais probablement pas obtenu mon diplôme au printemps.

En raison de la COVID-19, les opérations « non urgentes » ont été annulées. Tant de choses dépendaient des mesures sanitaires et du règlement de l’hôpital alors que, de mon côté, je m’efforçais de ne pas attraper la COVID. Je crois que je n’ai jamais autant pleuré que pendant ces deux semaines. J’étais accablée de savoir que l’aide était à ma portée, mais qu’elle risquait d’être retardée.

Finalement, la date de mon opération a été fixée au 20 janvier 2022. Les semaines qui ont précédé l’intervention ont été un véritable enfer.

En raison de la COVID-19, les opérations « non urgentes » ont été annulées. Tant de choses dépendaient des mesures sanitaires et du règlement de l’hôpital alors que, de mon côté, je m’efforçais de ne pas attraper la COVID. Je crois que je n’ai jamais autant pleuré que pendant ces deux semaines. J’étais accablée de savoir que l’aide était à ma portée, mais qu’elle risquait d’être retardée.

Heureusement, mon médecin a insisté pour que la procédure ait lieu et, le 20 janvier, j’ai subi une laparoscopie diagnostique, une ablation des lésions d’endométriose et l’insertion d’un bloc nerveux. Je me souviens de mon arrivée en salle de réveil. J’avais du mal à garder les yeux ouverts, mais je me suis efforcée de demander à l’infirmière s’ils avaient trouvé des traces d’endo. Elle m’a dit qu’ils avaient prélevé ce qu’ils pensaient être des tissus endométriaux à deux endroits. 

La semaine suivante, j’ai reçu des résultats qui confirmaient ces soupçons. C’était pour moi une incroyable validation.

J’avais raison depuis le début, je connaissais mon corps.

La vie après l’opération a été merveilleuse. J’ai passé presque tous les jours sans douleur. Il y a encore un ou deux petits trucs, mais c’est tout à fait gérable. J’ai pu reprendre mes activités préférées. J’ai même parcouru 19 km à vélo l’été dernier, un exploit dont je suis très fière!

Depuis l’opération, je suis beaucoup plus à l’aise de raconter mon histoire et de joindre ma voix à celles des autres membres de la communauté de l’endo afin d’exhorter le gouvernement fédéral à mettre en œuvre un plan national de lutte contre l’endométriose.

Envie d’en savoir plus sur les activités de sensibilisation à l’endométriose? Lisez notre article What is the EndoAct Campaign, and How is it Helping People with Endo?.

En avril, j’ai eu une rencontre fructueuse avec Kate Wahl et mon député, Michael Barrett, qui a accepté d’appuyer l’adoption de la motion M-52. Cette motion reconnaît les problèmes entourant l’endométriose et réclame la mise en œuvre d’un plan d’action. Bref, j’ai réussi à convertir une expérience difficile en un travail positif de défense des droits des personnes aux prises avec ce problème.

Notre communauté est forte et résiliente. Je suis impatiente de voir des changements s’opérer. Nous espérons améliorer la compréhension et le traitement de la maladie dans l’intérêt des générations futures.

Le contenu de cet article ne constitue pas des conseils médicaux et ne saurait se substituer à l’avis d’un médecin. Si votre santé vous préoccupe, il est important que vous consultiez votre médecin et établissiez un plan de traitement qui vous convient en collaboration avec des professionnels de la santé.


À propos de Jena Wren (elle/la)
Bonjour! Je m’appelle Jena, j’ai 22 ans et je viens d’obtenir mon diplôme de l’Université d’Ottawa en études des conflits et droits humains. Je m’efforce de me positionner comme défenseure des droits des personnes atteintes d’endométriose et d’apporter du soutien aux membres de notre communauté. Pendant mes temps libres, j’aime m’adonner à la lecture, aux arts textiles et, plus récemment, au vélo et à la randonnée!

Sources

  • Gonzalez K, Trigo S, Miller C, Urajnik D. Rescheduling of Cancelled Elective Surgical Procedures Among Older Adults Post–COVID-19.

    Can Geriatr J [Internet]. 2021 Feb. 18 [cited 2022 Sep. 20];24(1):73-6.
    https://cgjonline.ca
  • Maddern Jessica, Grundy Luke, Castro Joel, Brierley Stuart M. Pain in Endometriosis. Frontiers in Cellular Neuroscience.

    VOLUME 14, 2020.
    https://www.frontiersin.org